Pour Asmae Benani, l’art n’est pas seulement une passion ; c’est une partie intégrante de son identité. Née à Fès, le talent exceptionnel de Benani était évident dès son plus jeune âge, reconnu et encouragé par ses enseignants.
« Depuis mon jeune âge, je reproduisais des illustrations de magazines. J’avais une imagination débordante, j’excellais en arabe, j’écrivais de la poésie et j’étais fortement influencée par Khalil Gibran. Dans les années 80 et 90, lors des compétitions organisées pour les fêtes du Trône, je gagnais toujours des prix en dessin et en calligraphie arabe. Mes professeurs m’ont orientée vers les arts plastiques, convaincus que j’avais un don naturel, » se souvient Benani.
Ces encouragements précoces ont été déterminants dans l’avenir de la jeune artiste. Son parcours a véritablement commencé au lycée Ibn Al Haytam de Fès, après avoir réussi le concours pour intégrer les études d’art. Avec un baccalauréat en arts plastiques en poche, Benani est devenue enseignante en éducation plastique à Témara après deux ans de formation au centre pédagogique régional de Rabat. Cependant, à 26 ans, elle nourrissait de plus grandes ambitions : « J’ai pris le risque de quitter l’enseignement pour tenter le concours des Beaux-Arts de Paris, que j’ai eu la chance de réussir. »
À la fin de ses études parisiennes, Benani a participé à un concours de fin d’études de la Fondation de France, destiné aux diplômés des Beaux-Arts. Son projet de création d’un atelier de gravure au Maroc lui a valu une bourse de la part de la fondation, marquant un tournant crucial dans sa carrière artistique.
« C’est là que mon parcours a réellement commencé. En 2008, je suis montée à Casablanca et j’ai réalisé un projet majeur avec Renault, produisant un livre sur l’histoire de Renault au Maroc, dont la couverture a été réalisée dans mon atelier. Ce projet m’a donné les moyens de vivre ma passion et de développer mon entreprise à Casablanca. Ensuite, les projets se sont enchaînés, » raconte-t-elle avec un sentiment d’accomplissement.
Benani s’est ensuite tournée vers le secteur des cadeaux d’affaires, se concentrant sur la gravure et la lithographie artisanale sur pierre. Ce marché de niche, qu’elle qualifie de succès, a attiré un soutien important de la part d’entreprises marocaines telles que Crédit du Maroc, Saham, Attijariwafabank et Dacia, lui permettant de poursuivre son rêve.
« Vivre de ma Passion » « Je me suis vraiment battue, et grâce à toutes ces entreprises, nous avons réussi à distribuer des centaines de lithographies à travers tout le territoire national pour promouvoir les artistes, montrer nos techniques de travail et encourager les gens à commencer à collectionner. C’était une première dans le secteur des cadeaux d’affaires au Maroc, » se félicite Benani.
Aujourd’hui, à 53 ans, en tant que gérante de la résidence d’artistes Flore Maison d’Artistes et de la galerie Flore Maison des Arts à Casablanca, spécialisées dans la gravure taille-douce, la lithographie et la sérigraphie, Benani considère avoir relevé son défi.
« Mon entreprise m’a beaucoup apporté, mais surtout pour mon pays. Vous savez, quand on achète une œuvre d’art, on l’accroche sur un mur ; ce n’est pas comme un chocolat qu’on consomme immédiatement. C’est aussi un héritage que nous transmettons à travers notre métier, » confie-t-elle avec émotion, ses paroles captivantes et son regard doux vous emportant.
Réfléchissant sur le marché de l’art au Maroc, Benani marque une pause avant d’exprimer ses préoccupations : « J’ai un conflit avec le marché de l’art ici. Il y a des problèmes de faux tableaux. L’artiste peintre marocain peut être égoïste. Le marché de l’art est difficile, ingérable, et le ministère de la Culture n’est pas suffisamment investi, » regrette-t-elle. Pourtant, ces défis ne la découragent pas. Benani garde une foi intacte dans l’avenir, une des clés de sa success story.